Le blog d'EDUCAPSY

Libres chroniques de "la matrice" d'un point de vue psychologique. L'écriture s'en tient au premier jet. Pertinence, précision, concision & vitesse. Telle est la visée. Le ton polémique est délibéré car "le combat est père et roi de tout" (Héraclite).

Saturday, September 24, 2005

Le meilleur des mondes

Dans Le Monde du 23 septembre, on trouvait la très bonne synthèse de Cécile Prieur sur le rapport INSERM relatif aux troubles des conduites. On trouvait aussi un éditorial anonyme intitulé "Zéro de conduite" qui illustre bien les difficultés de l'exercice consistant à produire du commentaire sur à peu près tout sans disposer de l'expertise correspondante. Après avoir opportunément pointé la pression du lobby pharmaceutique derrière les visées de dépistage précoce des troubles des conduites, notre éditorialiste anonyme met en question tant les "guidances parentales" que les "thérapies comportementalistes" proposées dans le rapport. Il le fait en rangeant l'ensemble dans une tentative de "médicalisation" et en renvoyant à Dolto "cette célèbre psychanalyste qui a reconnu aux enfants leur part de liberté". Ce double mouvement me paraît radicalement erroné. D'abord parce que les guidances parentales et les thérapies cognitivo-comportementalistes ne relèvent pas du domaine médical mais du domaine psychologique ensuite parce que l'idée de reconnaître aux enfants "leur part de liberté" n'est pas actuellement une idée qui fasse défaut à qui que ce soit. Contrairement à l'idée qui veut que "la liberté de l'un s'arrête là où commence celle de l'autre". Je renvoie ici, bien sûr, à cette "toute-puissance" dans laquelle de plus en plus d'enfants sont (non)éduqués et vis-à-vis de laquelle les guidances parentales et les thérapies cognitivo-comportementales apparaissent on ne peut plus adaptées. Le fait inquiétant dans le rapport INSERM n'est pas tant qu'il soit oublieux de Dolto, c'est qu'il tende à avaliser l'idée que les "troubles de la conduite" puisse relever du domaine médical quand il n'est pas, à ma connaissance, l'ombre d'un soupçon d'une preuve que le biologique puisse ici être concerné. Ce que l'on voit de plus en plus fréquemment dans les classes, ces troubles oppositionnels qui mettent les enseignants et leurs pratiques éducatives à rude épreuve, ce ne sont pas les effets de quelque génome taré dont on comprendrait mal pourquoi il deviendrait tout à coup si répandu, ce sont bien, au contraire, les effets d'une société individualiste qui prône la liberté de l'individu à tous les étages, sans mettre en garde contre les conséquences d'un passage à la limite. Cette limite, les enfants la franchissent obstinément, en quête d'un pouvoir qu'ils obtiennent mais qui jamais ne les rasssurent. Instaurer là-dessus un dépistage précoce validant par implicite l'hypothèse biologique, c'est asservir, incontournablement, une formidable population de clients et de supposés "malades" à nos multinationales de la chimie pharmaceutique. En effet, le praticien confronté à un enfant "dépisté" aura tôt fait le tour des solutions possibles : les moyens de guidances parentales et de thérapies comportementales étant ce qu'ils sont, ridiculement limités, la seule indication "pratiquable" sera le médicament originellement "de seconde intention" qui, de facto, passera au premier plan car disponible à volonté grâce à la diligence des lobbies pharmaceutiques. Bref, ya pas photo, Dolto est au oubliettes et le psychotrope sur la sellette. Pour s'en convaincre, il n'y aura qu'à suivre le montant des aides gouvernementales au développement des guidances parentales. Elles ne seront jamais à la hauteur de l'enjeu. Les drogues légales ont déjà gagné. Nous allons droit vers le meilleur des mondes, selon Bush.

Sunday, September 18, 2005

Tenir un blog a-t-il une fonction d'auto-thérapie ?

Alors que j'avais fait un premier pas en ouvrant ce blog, j'hésitais sur la direction à donner au second quand j'ai été accroché par le dernier post (17 septembre) du blog de Pierre Assouline (affiché sur la page d'accueil du Monde). Selon un sondage réalisé pour AOL (sic), 50 % des adeptes du blogging trouveraient dans cette activité une forme d'auto-thérapie. Assouline souhaitait une explication. Etant concerné au premier chef, j'ai proposé quelques hypothèses dans un commentaire reproduit ici :

En quoi un blog peut-il avoir une fonction d’auto-thérapie ? Je prends cette question d’autant plus au sérieux que je viens juste de démarrer mon premier blog et j’ai considéré cela comme un heureux « passage à l’acte », un progrès significatif dans le dépassement de mes tendances velléitaires et procrastinatrices. Bref, je me sens concerné et pour sûr, je me range dans la catégorie des blogueurs qui font dans l’auto-thérapie. Maintenant, pour ce qui est de comprendre en quoi tenir un blog peut servir une telle fonction, on peut avancer, me semble-t-il, plusieurs hypothèses qui n’épuiseront sans doute pas le sujet mais permettront néanmoins de cadrer quelque peu la problématique.

La première devrait renvoyer à la fonction stabilisatrice et ordonnatrice de l’écrit affirmée, par exemple, dans l’effet thérapeutique bien connu d’un journal qui, tenu quotidiennement, nous amène à porter une plus grande attention à notre vécu, nous pousse à l’ordonner, à le rendre plus cohérent et davantage chargé de sens. Tenir un journal ou un blog peut ainsi nous donner le sentiment d’un meilleur contrôle sur notre vie et si quelque chose est thérapeutique, c’est bien cela.

La seconde hypothèse pourrait concerner, me semble-t-il, l’impact du « miroir social » que constitue le cybermonde auquel le blogueur s’adresse en définitive, quelles que puissent être ses dénégations. Ce regard que les autres portent sur ce qui constitue une expression de soi, qu’il se dise au travers de commentaires ou qu’il reste silencieux, véhicule une certaine forme de validation sociale, une forme de reconnaissance qui vient alimenter le blogueur qui se sent ainsi exister, « en lien », bien plus qu’il ne le pourrait s’il engrammait simplement ses pensées sur quelques cahiers rangés dans un tiroir. Cette fonction de validation sociale de soi pourrait bien être considérée comme la forme généralisée, banalisée, j’ai envie de dire, sécularisée, de cette validation que procure la cure analytique dans l’espace de laquelle nous pouvons enfin « entendre » nos pensées parce que nous les prononçons pour un autre.

Enfin, une troisième hypothèse devrait, à mon sens, concerner, ce sentiment d’être agent, ou acteur, que procure le fait de prendre position, de s’affirmer dans un dire qui, ainsi que nous le rappelait Austin, est aussi un faire. D’où cette idée de « passage à l’acte » dont la valeur est encore accrue par la validation sociale précédemment évoquée. Nous nous sentons d’autant plus acteurs que nous nous savons en présence de spectateurs.

Comme on peut le constater, ces hypothèses relatives au « miroir social » nous font sortir de l’auto-thérapie au sens strict. Nous serions plutôt dans l’auto-hétéro-thérapie. Mais c’est plutôt une bonne chose. Je trouverais cela inquiétant s’il nous fallait croire aux aventures du Baron de Munchausen…

Sunday, September 11, 2005

Premier post

C'est ce qui s'appelle un passage à l'acte.